Regards croisés sur sur Athanase David et Ernest Cormier

Le 130e anniversaire du Mont-Saint-Louis nous semblait un moment opportun pour honorer deux anciens, qui ont connu les débuts de l’histoire du Collège et qui ont fortement marqué la société québécoise.

Le MSL

Les deux hommes dont il s’agit, puisque le Mont-Saint-Louis n’avait pas encore à l’époque le privilège d’accueillir des femmes, sont nés à la fin du XIXe siècle et se sont suivis sur les bancs du Collège. Le premier, Athanase David, est devenu avocat et homme politique, tandis que le second, Ernest Cormier, a étudié le génie civil, avant de devenir architecte.

Le jeune Athanase a fréquenté le Mont-Saint-Louis de 1891 à 1895, alors que son confrère Ernest y était de 1895 à 1902. On les retrouve d’ailleurs tous les deux en premiers communiants, très sérieux, sur des photos du livre souvenir du demi-siècle du Collège.

Nous aimons à penser que l’élève David a assisté, ébahi, à la séance de… lanterne magique proposée aux élèves à la rentrée scolaire de 1891 et qu’une œuvre du jeune Cormier a fait partie des travaux des élèves du Collège récompensés à l’Exposition universelle de Paris en 1900.

La Première Guerre mondiale

Nos deux anciens ont connu les temps troublés du début du siècle dernier.

Admis au Barreau du Québec en 1905, brillant orateur, Athanase pratique le droit pendant une dizaine d’années au sein de différents cabinets montréalais, avant d’entreprendre une carrière politique. En 1914, il est président de l’Association du jeune Barreau de Montréal. Pendant la Première Guerre mondiale, Athanase David est député libéral de Terrebonne. À titre de secrétaire de la province de Québec, il intervient jusqu’en 1936 dans les secteurs de l’éducation, de la santé, des affaires sociales et de la culture.

Diplômé de l’école polytechnique de Montréal, Ernest Cormier poursuit ses études à l’École des beaux-arts de Paris. Récipiendaire d’une bourse, Cormier passe le début de la première guerre à Rome, où il s’imprègne des trésors de l’architecture gréco-romaine, de la Renaissance et du Baroque italien. De retour à Paris en 1917, il travaille pour une firme d’ingénieurs et obtient le diplôme d’architecte du gouvernement français.

Le service public

Nos deux amis ont consacré leur vie au service public.

Comme député, Athanase David fait de l’éducation une de ses priorités. Il a d’ailleurs prononcé une conférence sur ce thème en décembre 1920, devant la très jeune Association des anciens du Mont-Saint-Louis, qui venait de souligner sa première année d’existence. Il sert au sein des cabinets de Gouin et de Taschereau, assurant la mise en œuvre d’importantes mesures sociales et culturelles, qui ont marqué les débuts de l’intervention de l’État en éducation et en santé. En 1940, il devient sénateur et le demeure jusqu’à son décès.

De retour à Montréal en 1918, Ernest Cormier se fait rapidement un nom. Architecte et ingénieur de talent, sa sensibilité et ses intérêts le portent vers la commande publique. Au début des années 1920, il conçoit avec Jean-Omer Marchand l’École des Beaux-Arts de Montréal. Puis, il collabore à la conception de l’annexe au palais de justice de Montréal. En 1925, il devient l’architecte de l’Université de Montréal et dessine le plan de son nouveau campus et de son pavillon principal. À la fin des années 1930, il dessine le bâtiment de la Cour suprême du Canada, à Ottawa. En 1947, il conçoit les portes d’entrée du siège de l’Organisation des Nations unies à New York. Dix ans plus tard, il entame l’un de ses derniers grands projets, le Grand Séminaire de Québec, aujourd’hui intégré à l’Université Laval.

La culture

Nos deux confrères ont fait beaucoup pour la culture au Québec.

Nous devons à Athanase David la fondation d’importantes institutions culturelles comme les Archives nationales, le Musée national des beaux-arts du Québec, l’École des beaux-arts de Montréal et de Québec et la Commission des monuments historiques. Il fait adopter en 1922 une loi qui instaure des concours littéraire et scientifique, destinés à soutenir le travail des écrivains et des chercheurs. Ces concours donnent accès à des prix, appelés à l’époque les Prix David, devenus aujourd’hui les Prix du Québec.

Pendant plus de trente ans, Ernest Cormier œuvre comme professeur à l’école Polytechnique et à l’école des Beaux-Arts, soucieux de transmettre son savoir. Doté de nombreux talents, il se consacre aussi à l’aquarelle et à la reliure. C’est un artiste. Sa maison, qu’il a dessinée et fait construire, a été classée monument historique par le Gouvernement québécois en 1974. Elle est aujourd’hui considérée comme un chef-d’œuvre de l’Art déco.

Les honneurs

Nos deux illustres anciens ont eu droit à plusieurs honneurs.

Athanase David est fait chevalier de la Légion d’honneur en 1923, puis officier et commandeur. En 1944, le village de Saint-Jean-Baptiste-de-Bélisle, dans les Laurentides, est renommé Val-David en son honneur et en celui de son père, Laurent-Oliver David, avocat, journaliste et homme politique. En 1968, le Prix du Québec, en littérature, devient le prix Athanase-David.

En 1929, Ernest Cormier est reçu compagnon de l’Institut royal des architectes britanniques. En 1942, il reçoit un doctorat honoris causa de l’Université de Montréal, puis reçoit l’Ordre du mérite de l’École polytechnique. Parmi de nombreuses médailles, on compte celle d’officier de l’Ordre du Canada en 1974. En 2014, le Gouvernement du Québec crée, dans le cadre des fameux Prix du Québec, le prix Ernest-Cormier, pour honorer l’ensemble d’une œuvre dans les domaines de l’architecture et du design.

L’AAMSL a accueilli Athanase David et Ernest Cormier au Panthéon des anciens, deux hommes au parcours inspirant, deux anciens auxquels le Mont-Saint-Louis est fier de rendre hommage.

Sylvie Drolet, directrice générale du Collège Mont-Saint-Louis

Septembre 2018

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