Desneiges Pepin, promotion 1975

Que la véritable Desneiges Pepin veuille bien s’identifier!

Vous souvenez vous de ce jeu télévisé, durant lequel les participants étaient confrontés à quelques individus portant le même nom? A l’aide de questions, ils devaient démasquer les imposteurs et trouver le seul véritable porteur du nom. Je vous propose une version MSL du jeu : je vous présente trois Desneiges Pepin; à vous de trouver la véritable.

Desneiges Pepin, mère de famille

À partir du Cégep, elle décide de ne porter que son deuxième prénom, Desneiges. Donc ceux qui l’ont perdu de vue depuis le secondaire s’en souviendront sous celui de France. En plus d’un attachement à cet ancien prénom québécois, bien présent dans la famille, sa volonté de le perpétuer se veut également un hommage à sa mère et amie, qui le portait également. Décédée jeune, après une longue bataille contre le cancer, elle lui a appris à vivre sa vie pleinement et intensément.

Quelques années plus tard, alors que tous la voient dans le rôle d’une « professionnelle bien en vue », surprise! elle abandonne l’idée d’une maîtrise pour faire des bébés! (on n’a qu’une seule vie…) Même si ses trois fils, Johann-Frédérick, Vladimir et Ludovic, (22, 20, 17 ans) semblent longs à quitter l’adolescence, elle n’a jamais regretté ce choix. Lorsqu’un de ses fils lui a annoncé la veille de son départ qu’il allait vivre avec sa blonde, elle s’est souvenu avoir téléphoné chez elle pour annoncer qu’elle ne rentrait pas car elle venait de rencontrer quelqu’un et qu’elle passerait chercher ses meubles dans quelques jours. Ce quelqu’un, c’était Pierre Juillet, son compagnon de vie depuis 25 ans.

Desneiges Pepin, avocate et syndicaliste

Une autre petite blonde aux cheveux longs, mais un peu plus grande (tailleur, talons). Quoique membre du Barreau depuis 1982, elle ne pratiquera que quelques années en droit familial et en droit fiscal.

Rebelle et engagée, elle choisit plutôt de s’investir dans le syndicalisme agricole. D’abord en région, où elle est présidente du Syndicat des producteurs d’agneaux de Lanaudière.

Elle est rapidement projetée au niveau provincial, où elle sera présidente de la Fédération des producteurs d’agneaux du Québec de 1992 à 1999 et membre du conseil exécutif de l’Union des producteurs agricoles (UPA) de 1993 à 1998. Première femme à occuper ces postes, elle est habituée à côtoyer une majorité d’hommes.

À la Fédération, elle s’est appliquée avec rigueur et détermination, à contribuer au développement de la production ovine au Québec par la mise en place d’un centre d’expertise, le développement de recettes d’agneau, la participation de cette production aux décisions entourant les grands enjeux agricoles et l’augmentation de la visibilité accordée à cette production.

Une de ses plus grandes batailles a été de faire changer le programme d’indemnisation des producteurs touchés par la destruction de leurs animaux due à des maladies à déclaration obligatoire, et ce pour toutes les espèces animales au Canada.

Elle ne pouvait supporter que le Canada se vante de posséder un des meilleurs programmes de contrôle de maladies animales tels que la tremblante, la tuberculose ou la vache folle, alors que la grande efficacité du programme reposait sur la participation volontaire des producteurs en déclarant eux-mêmes la présence de ces maladies dans leur troupeau. Producteurs acculés à la faillite au lendemain de ces déclarations.

Elle a parcouru le Québec et le Canada pour cette mission, et a rencontré des fonctionnaires et des ministres. On raconte même qu’un ministre fédéral de l’agriculture la voyait arriver de loin et se cachait derrière ses gardes du corps! Il faut dire qu’elle ne manquait pas une occasion de lui rappeler son travail, comme lors d’une manifestation de 500 producteurs et leurs moutons à Ottawa ou une présence remarquée lors d’un important  point de presse du dit Ministre, durant laquelle elle avait enclenché une bande sonore de 400 brebis réclamant à grands bêlements leur grain quotidien!

À l’Union des producteurs agricoles, elle s’est surtout distinguée dans la défense des productions alternatives (dites non traditionnelles), le rapprochement de l’agriculture et des citadins ainsi que dans le développement de l’agrotourisme. Elle a présidé à sa naissance le Groupe de concertation sur l’agrotourisme au Québec.

Il y a quelques années, elle décide de consacrer plus de temps à sa famille en mais de garder le contact avec les producteurs agricoles et la possibilité de parcourir le Québec, en offrant aux producteurs agricoles en régions, une série d’ateliers de formation en agrotourisme.

Récemment les membres du jury du concours Place aux femmes dans la restauration et l’alimentation, lui remettaient le titre de « Coup de cœur » de l’édition 2005, pour souligner et reconnaître ses qualités professionnelles, son rayonnement dans son entreprise et l’industrie alimentaire ainsi que la diversité de son entreprise.

Desneiges Pepin, agricultrice et aubergiste

Il y a vingt ans cette année, cette citadine pure laine, s’installait sur une ferme dans Lanaudière, comme elle le désirait depuis son enfance. Son amour des animaux, du tricot et l’accessibilité de la production, la guideront vers le choix de la production ovine. On commence avec 11 brebis. Toutefois elle réalise vite qu’au Québec on ne garde que des races de moutons à viande. Mais même en apprenant à tricoter de la saucisse, elle réalise qu’il faudrait plus de 400 brebis pour espérer en vivre. Durant les premières années, le troupeau augmente tranquillement, manque de fonds. En 1989, il passe de 70 à 200 brebis.

Il faut tout apprendre quand on n’est pas du milieu ! Mais elle fait ses devoirs, tant et si bien, qu’en 1991 Pierre et elle se présentent au crédit agricole pour du financement (2e demande : la première ayant été refusée, manque de formation!).

Cette fois-là, c’est accepté sur la base de l’expérience acquise et du marché développé pour leurs agneaux—en effet ils ont toujours vendu leurs agneaux directement aux consommateurs. De plus, on reconnaît leurs efforts pour améliorer la qualité des animaux par la présence d’animaux de races pures et l’utilisation de l’hybridation, croisement entre deux races pures de races différentes, pour des qualités précises et la vigueur des animaux.

En 1991, le troupeau augmente à 400 brebis, moitié races pures, moitié hybrides. Une nouvelle bergerie est construite; c’est la première bergerie entièrement ventilée naturellement au Québec. Elle servira de modèle pour plusieurs autres.

Toute la famille participe aux travaux dans la mesure de ses capacités. En 1994, la maison familiale presque centenaire est agrandie, en respectant son style architectural  « boom town » – ils sont amoureux du patrimoine.  Elle y ajoute une boucherie artisanale, où elle transforme depuis son agneau et ses charcuteries (de la merguez aux rillettes) qu’elle vend dans leur boutique à la ferme. On y retrouve également une magnifique salle à manger, dans laquelle elle propose des tables gourmandes pour des groupes.

Leur amour du patrimoine les pousse en 1998 à acheter la maison voisine pour lui redonner son allure originale : une école de rang centenaire. Ils y aménageons un gîte de cinq chambres avec chacune sa propre salle de bain, tout en conservant le caractère autonome de la maison : salon avec foyer, cuisine équipée,  terrasse. Cela est très apprécié de la clientèle, qui recherche le charme du gîte avec l’intimité et le confort d’aujourd’hui. Un grave incendie les oblige à reprendre beaucoup de travaux et à reporter l’ouverture en 1999.

En 2001, le troupeau est détruit dans l’application des mesures de prévention du programme de la tremblante du mouton. C’est un peu comme perdre le plancher sous ses pieds. Le rêve d’enfance est terminé.

Elle fait alors le choix de reprendre l’élevage mais à plus petite échelle : 125 brebis, cela lui permettra de s’investir davantage dans son rôle de transformatrice et d’aubergiste. Et d’améliorer sa qualité de vie. Après tout, on a qu’une seule vie…

Votre choix parmi les trois

Ceux qui ont fréquenté le collège entre 1970 et 1975, ont sûrement reconnu la petite blonde aux longs cheveux qui repartait souvent du collège avec grandes bottes noires et bombe pour aller voir sa jument.

Et oui, je l’ai fait, j’ai la vie, la famille et la ferme dont je rêvais. Cela n’a pas toujours été facile parce que je n’ai pas voulu attendre la retraite pour faire ce dont j’avais envie (j’avais trop peur de ne pas m’y rendre). C’est une histoire de choix : je m’habille dans les friperies, je n’ai pas une auto de l’année et mes REER en feraient rire plus d’un! Mais je ne manque de rien!

Mon énergie à accueillir les gens sur ma ferme et toutes mes implications à l’extérieur de la ferme sont une façon pour moi de partager mon privilège et de contribuer à changer les choses.

Et comme on n’a qu’une seule vie… alors j’ai dû mener les trois vies de façon simultanée!

Desneiges Pepin, promotion 1975

Juin 2005

www.bergeriedesneiges.com

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *